Le statut fiscal et social de l'auteur autoédité

La question administrative du statut fiscal et social de l'auteur autoédité est toujours un peu problématique, car… bah, on ne rentre pas dans les cases. Enfin si, mais aucune case n'a le nom « autoediteur » alors on doit faire quoi ?

Dans l’article et la newsletter de cette semaine, on aborde une question difficile et technique qui va donner du fil à retordre. Surtout à moi, pour être clair. Donc, préparez votre réserve de paracétamol (Efferalgan, Doliprane ou générique).

Avant de rentrer dans le sujet, il est important de préciser que même si j’édite le livre de Margerie Véron Le droit d’auteur pour les écrivains, je ne suis pas juriste comme elle (Dieu merci, ça, ce n’est pas contagieux !) et mes conseils peuvent être flous, vagues ou inexacts. C’est par ailleurs un sujet que j’ai longtemps évité de traiter, car :

  1. il est rébarbatif
  2. il est complexe
  3. chaque personne peut avoir un statut particulier (agent de la fonction publique, quelqu’un ?)

Mais ça y est je me lance…

Le statut d’auteur

Par rapport au droit de la propriété intellectuelle, vous êtes auteur à partir du moment où vous avez publié quelque chose.

C’est cette question qui est discutée en long et en large par Margerie dans le livre précité. Je ne vais pas le recopier ici, je vous invite donc à le lire, elle est bien plus qualifiée que moi, tant par ses études et sa qualité que par sa pratique.

J’évoque juste la question ici pour préciser que les deux éléments que sont le statut fiscal et social dont je vais parler plus loin n’ont rien à voir avec cette question de propriété intellectuelle.

Et donc quand on est auteur, on ne tombe pas forcément dans une boîte étiquetée « auteur » qui aurait des conséquences fiscales et sociales (ce serait trop beau). Quand on est auteur autoédité encore moins.

Statut fiscal

Le statut fiscal est géré par un ensemble de lois et de règles définies dans le code des impôts. Si vous avez envie de dormir, il est disponible sur legifrance.gouv.fr et ce doit être votre référence pour toutes les questions juridiques, avec l’aide d’un conseiller juridique.

Le statut social est géré par un code différent, le code de la sécurité sociale (youhouu, encore plus soporifique).

Ces deux codes sont écrits et votés par des personnes différentes, votés par des parlementaires à des moments différents : on n’est donc pas à l’abri de quelques incohérences entre les deux, ou de lacunes pour passer de l’un à l’autre.

Dans un cas comme dans l’autre, l’impôt et les taxes sociales sont dus dès le premier euro. Il est donc inexact de considérer que si son activité est en démarrage, ou faible, il ne faut pas la déclarer et qu’on peut passer à travers les gouttes. Mais ça, c’est la théorie.

En pratique, aucun agent des impôts n’a de temps à perdre à venir vérifier les déclarations de tous les auteurs autoédités pour récupérer quelques centaines d’euros d’amende. Mais cette pratique peut varier et il n’y a pas de « seuil » à partir duquel on peut considérer que « ça passe ». 1 € et c’est tout.

Le statut fiscal de l’auteur édité

Quelle est votre activité principale ? Êtes-vous un salarié, un fonctionnaire, un indépendant qui travaille dans un autre métier la majorité du temps et dont l’activité d’auteur édité ne lui rapporte qu’une minorité de ses revenus ? Ou est-ce que vos revenus versés par les maisons d’édition sont vos principaux revenus ?

Votre contrat d’édition est un véritable contrat d’édition et votre éditeur déclare le produit de vos droits d’auteurs ?

Ces revenus sont alors des revenus accessoires et doivent être rangés dans la catégorie des salaires de votre déclaration de revenus.

Le texte de loi du code général des impôts le précise à l’article 93-1 quater :

1 quater. Lorsqu’ils sont intégralement déclarés par les tiers, les produits de droits d’auteur perçus par les auteurs des œuvres de l’esprit mentionnées à l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle sont, sans préjudice de l’article 100 bis, soumis à l’impôt sur le revenu selon les règles prévues en matière de traitements et salaires.

Cela a le mérite d’être simple, direct et rapide. Auteur édité : vos redevances de droits d’auteur sont des revenus assimilés à des salaires.

Le statut social de l’auteur édité

Là aussi, les choses sont aujourd’hui claires et simples. En tant qu’auteur édité, soit votre éditeur effectue le précompte de vos cotisations sociales à l’URSSAF et à l’AGESSA (la même chose puisque l’AGESSA a été absorbée par l’URSSAF), soit vous devez faire vos déclarations de cotisations sociales vous-même.

Cela continue à cafouiller après l’intégration de l’AGESSA dans l’URSSAF du Limousin, et la situation sanitaire ne va pas aider, même in peut espérer que cette agence de l’URSSAF arrête d’envoyer des courriers sans queue ni tête rapidement et que la situation s’éclaircisse dans les mois et années qui viennent.

Pour en savoir plus et agir par rapport au bordel, je vous conseille de cotiser (5 € !) à la Ligue des Auteurs Professionnels et à suivre les informations de cette association qui est rapidement devenue une référence dans la défense des auteurs vis-à-vis des institutions, de l’état etc.

Mais là aussi, on ne parle que du statut assez balisé de l’auteur édité.

Le statut fiscal de l’auteur autoédité

Si les revenus de l’auteur édité seuls rentrent dans le cas figure pré-cité, cela signifie par extension qu’un auteur auto-édité ne peut pas déclarer ses revenus comme des salaires.

D’ailleurs les revenus que vous touchez d’Amazon, Kobo ou autre ne sont pas non plus des droits d’auteur, ce sont des redevances de distributions. Si vous avez un doute, relisez les conditions générales de Kindle Direct Publishing par exemple, accessibles sur https://kdp.amazon.com/fr_FR/help/topic/G200627430

Les redevances que vous percevez en relation avec l’autoédition sur des plateformes d’autoédition ne sont pas des droits d’auteurs.

Fixez bien cette information dans votre esprit et arrêtez de mélanger droits d’auteur et redevances ou revenus de distribution.

Ainsi ces revenus vont forcément rentrer dans la catégorie des bénéfices non-commerciaux de la déclaration de revenus.

C’est ce que font la plupart des auteurs autoédités qui veulent se mettre au clair avec les impôts, mais ne veulent pas faire de déclaration complexe.

Malheureusement, ce n’est pas parce que c’est ce qu’un grand nombre de personnes font que c’est la bonne manière de faire. Vous vous souvenez de la règle du premier euro dû ? Il en est de même pour le statut et les déclarations.

Or, de fait, en acceptant les conditions générales d’Amazon pour KDP, de Kobo pour Kobo Writing Life, puis en percevant des redevances, vous devenez une entreprise individuelle à tout le moins.

Et une entreprise individuelle doit être enregistrée par le greffe du tribunal de commerce, payer certaines taxes et charges. Et patati et patata. Les charges sociales aussi doivent être payées à l’URSSAF, selon le principe bien connu de solidarité.

À l’intérieur du statut d’entreprise individuelle, il existe un sous-statut simplifié en termes d’obligations, une sorte de parcours fléché et contrôlé, qui est le statut de micro-entreprise. Ce statut vous permet de bénéficier des mêmes fonctionnements que l’entreprise individuelle, mais simplifie énormément la gestion des charges fiscales et sociales de l’entreprise.

Bref, ceci n’est pas un site sur la création d’entreprise individuelle, alors dès que vous vous engagez sérieusement dans l’autoédition et que vos revenus dépassent le zéro absolu, allez vous inscrire en tant que micro entreprise.

La meilleure ressource pour en savoir plus sur ce régime est https://www.economie.gouv.fr/entreprises/micro-entreprise-auto-entreprise, sur le site du ministère de l’Économie et des Finances. Vous trouverez d’autres sites qui pourraient vous fournir des informations, mais comparez-les à celles de ce site.

Très franchement, pour avoir été pendant plusieurs années un indépendant, cotisant directement à l’URSSAF et subissant sa gestion et son fonctionnement kafkaïen, je vous conseille d’éviter le statut d’entreprise individuelle « sec ». Gérer l’administratif, recevoir des lettres de recouvrement, payer des taxes que vous ne comprenez pas, avec un calendrier que vous ne connaissez pas, à moins de travailler par ailleurs dans un cabinet comptable, ce n’est pas de tout repos. Cela vous éprouve physiquement et moralement.

Mettre la tête dans le sable n’est pas non plus une bonne politique.

Le cas particulier des fonctionnaires et enseignants

Un fonctionnaire n’a longtemps pas eu le droit d’avoir une activité d’auto-entrepreneur ou une micro-entreprise. Cela est maintenant possible, mais il faut demander l’autorisation à des autorités compétentes au sein de l’administration.

Pour le cas des auteurs édités qui sont aussi agents de la fonction publique :

V.-La production des œuvres de l’esprit, au sens des articles L. 112-1, L. 112-2 et L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle, s’exerce librement, dans le respect des dispositions relatives au droit d’auteur des agents publics et sous réserve de l’article 26 de la présente loi. Les membres du personnel enseignant, technique ou scientifique des établissements d’enseignement et les personnes pratiquant des activités à caractère artistique peuvent exercer les professions libérales qui découlent de la nature de leurs fonctions.

L’article 26 a trait au secret professionnel et limite évidemment la possibilité pour les fonctionnaires de s’exprimer sur leur activité en tant que fonctionnaire.

Pour les autres, tout ce que j’ai pu trouver jusqu’à présent est sur le site fonction-publique.gouv.fr. Vous trouverez probablement plus d’informations sur ce site de la fonction publique.

Mon cas personnel

Je suis gérant assimilé salarié d’une SARL (bientôt une SAS) et à ce titre je suis rémunéré comme avec un salaire. Je paye mes cotisations sociales (part salariale et part employeur), mes revenus sont assimilés à des salaires. Je paye ma tranquillité très cher en termes de revenus, mais je suis très tranquille.

Merci à Philippe Laurent d’avoir donné l’idée de cet article.

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